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Retraites : euthanasier l’état social

Le drame du débat sur les retraites vit ses dernières années. Il s'éteindra mollement avec une génération entrainée vers l'abîme par une philosophie mourante.

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Un psycho-drame social et cyclique

Depuis mon enfance je vois se dérouler en france le psychodrame maintenant traditionnel qu'on nomme "réforme des retraites". C'est devenu un grand rituel païen qui fait appel aux passions et aux rêves irrationnels, une mise en scène où l'occidental appeuré et en colère fait appel aux puissances surnaturelles de l'État social pour lui venir en aide.

Nous voici revenu aux temps antiques où les peuples attendaient du ciel une aide afin de faire face à leurs besoins matériels.

D'où vient cette régression ? Je vous propose de suivre une piste qui peut expliquer de nombreux phénomènes similaires par un faisceau de causes étroitement liées. Au bout de cette escapade philosophique on pourra mieux comprendre ceux qui dénoncent l'idolatrie de notre temps et qui veulent euthanasier l'État social.

Les coupables

Mes sources (que je ne nomerai pas) ont désigné les coupables. Ils ont un nom compliqué, mais ne vous inquiétez pas, la traduction est fournie. Les coupables sont : l'agnosticisme phénoménologique et son copain l'immanentisme religieux. Ce sont des parti-pris philosophiques, qui vous habitent peut-être, et qui ont pris racine en politique sous la forme de l'État social.

En tirant le fil des sources philosophique de la modernité, on peut parvenir à mettre en lumière la part d'idolatrie et d'ignorance qui sert de fondement à la mise en place de l'État social, et qui aboutit à la destruction de l'effort civilisateur et à l'épuisement de nos ressources naturelles. Rien que ça.

La perspective phénoménologique

La phénoménologie se rattache à la tradition idéaliste de Platon et Héraclite avant lui, elle est le prolongement du Cogito cartésien. La réduction phénoménologique est une mise en application systématique du doute, de la défiance envers le monde qui est constitué de "phénomènes" qui apparaissent et n'ont peut-être pas d'existance indépendante de notre conscience. Il existe plusieurs courant, et la phénoménologie à laquelle nous nous référons est une forme d'agnosticisme, de renoncement à la connaissance.

Ça a l'ai un peu tordu mais c'est l'aboutissement de toute une tradition philosophique à laquelle adhèrent tous les penseurs qui ont du poids aujourd'hui, ceux qui ont une influence agissante sur les programmes politiques, sur l'éducation de vos enfants et finalement sur toute votre vie.

En écoutant un philosophe phénoménologiste, on pourrait se dire que cette pensée est une "philosophie des anges" en cela qu'elle réduit le champ d'action de la raison au contenu de la conscience, de la mémoire et de l'imagination. Mais, on le sait, qui veut faire l'ange fait la bête.

La réalité et la causalité sont mise en doute, ce faisant l'Homme n'existe plus, il n'existe plus qu'une expérience humaine vécue au travers de la conscience. C'est la conscience qui est l'unique "phénomène vrai", accessible à l'analyse et point de départ de toute réflexion politique.

Voyons où cela peut nous mener ...

L'immanentisme comme solution

À partir d'un tel fondement, quel est le modèle d'État qui s'offre à nous ? C'est ici qu'intervient l'immanentisme religieux qui va prendre le relai. La phénoménologie assimile le réel au contenu de notre esprit, et l'immanentisme organise ce réel en fonction de notre vie affective, des sentiments qui émergent de notre expérience subjective. L'immanentisme remplace la religion en nous reliant à l'Univers, mais c'est un Univers intérieur.

C'est sur ce fondement qu'est bâtie la religion moderne. Et de la religion on est passé à la politique sans s'en apercevoir. Le dogme de l'État social est en germe dans l'immanentisme et en est indissociable.

En effet l'expérience subjective est devenue le critère principal des décisions morales et politiques. Par exemple il devient ainsi difficile de réformer notre pensée au sujet des "risques sociaux" : maladie, vieillesse, chômage, maternité. Précisons ce point.

Les risques sociaux

Les réalités de la vie sont passées d'abord au filtre phénoménologique. Il s'agit d'apparences et la maladie se réduit à une expérience de vie négative. Ce qui devient essentiel c'est de traiter cette expérience, et non pas la maladie. C'est une médecine où le bien-être à pris le pas sur la santé.

Là où le philosophe réaliste dira qu'il est possible de maintenir son corps en bonne santé par de l'exercice et une nourriture saine, le moderne se concentrera sur l'expérience vécue de la souffrance, sans aucune considération pour la causalité. Le moderne demande de considérer uniquement l'expérience négative qui est immanente, vécue et qui a plus d'importance pour lui que la réalité du corps malade qui est transcendante et reçue.

Dans les discussions contemporaines sur les risques sociaux, cette pré-éminence de l'expérience subjective rend impossible le raisonnement. Et la perspective d'évolution est toujours en direction d'une plus grande prise en charge de la subjectivité. C'est là qu'on rejoint les revendications caractéristiques de notre époque, les "droits à...".

L'éducation et le Théatre de la vie

On retrouve une dynamique similaire dans l'éducation. C'est le vécu de l'enfant qui prime sur la réalité du savoir à acquérir. Le résultat attendu sera de passer un bon moment, une bonne journée, sans souffrance. La notion d'effort est masquée par une mise en scène ludique qui reporte la charge mentale de l'apprentissage sur l'adulte.

Chaque aspect de notre vie devient une scène de théatre, une mise en scène. Le travail devient un lieu d'expression de notre personnalité. Le rapport à l'employeur est adouci par la présence d'un dispositif légal qui joue le même rôle que l'éducateur dans l'école moderne : il diminue les souffrances et met en place une mise en scène ludique.

La prise en charge de la subjectivité est devenue une part importante de notre budget social.

 

L'écueil de la vieillesse

Mais dans toute pièce de théatre il y a une fin. Comment adoucir l'expérience de la fin de vie ? Par la sédation ?

Dans la vieillesse il n'est pas possible de masque les réalités. On fait appel un temps à la science médicale mais ici la mise en scène ne fonctionne plus.

Au début de la vie nous sommes fragiles et dépendants. La nature a pourvu à cette situation au travers de l'amour filial qui aide les parents à surmonter les expériences désagréables liées début de la vie de leur enfant (sommeil, couches, vergetures).

La philosophie réaliste nous met en face de nos responsabilités et exige un retour de cet amour filial en direction de nos ainés. Mais face à ce devoir l'immanentisme interpose l'expérience concrète et jugée désagréable de la prise en charge personnelle des vieux.

Cette expérience est difficile à justifier, en particulier face aux propositions d'expériences agréables qui nous parviennent de toute part. Le marketing et la publicité s'appuient sur l'immanentisme et nous promettent une parade à toute perspective d'expérience désagréable.

Et c'est ainsi que le moderne est sans solution et tente d'éviter l'expérience de la vieillesse et de la mort. Vaine tentative.

Le mur de l'économie

C'est dans ce contexte que les risques sociaux sont devenus des enjeux politiques collectifs. Ils ont été évacués des réalités humaines individuelles. Mais cette collectivisation ne fonctionne pas en pratique. Elle mène à un traitement collectif de toutes les expériences négatives et rencontre le mur des ressources matérielles. Comment financer les retraites, les divorces, la démission éducative ? Comment pousser les individus à prendre en main leur santé corporelle et psychologique, à accepter le combat économique ? Comment évacuer toutes les expériences négatives ?

L'État social a la solution : il faut redistribuer. Le partage des ressources dans ce contexte sort du calcul économique et devient un enjeu passionnel. Les revendications "vitales" qui s'expriment dans les politiques sociales n'ont pas de limites. On revient ici au fondement phénoménologique de la modernité.

Pour l'esprit, la réalité est inconnaissable, elle est un phénomène d'un rang inférieur à l'expérience vécue de la souffrance ou du plaisir. C'est cette expérience qu'il faut financer, et non pas la résolution des problèmes réels.

L'emballement social

Alors l'esprit va s'emparer du moteur économique dont il perçoit les résultats en termes d'expérience, et non comme une réalité donnée et limitée. Pour augmenter cette expérience positive de tous, les revenus vont être injectés dans la production de ces expériences, au moyens de la redistribution.

Sans la redistribution, les ressources seraient réparties par les dures lois économiques. Seraient favorisés les familles qui savent épargner, investir, se restreindre prendre soin de leur santé par la prévention plutôt que par la médicalisation de la vie, et qui transmettraient ces qualités à leurs enfants.

Avec la redistribution, on va déclencher un emballement économique et agraver l'impact environnemental de l'activité humaine. On retire le mécanisme d'auto-régulation rationnel de l'économie et on le remplace par les coups de fouets permanents et répétés des passions.

Plus près du mur

Dans un sketch qui parle de santé, un humoriste décrit l'état d'une personne fatiguée, qui a beaucoup travaillé et dont le corps réagit. La personne se sent mal. Et que va-t'on lui proposer ? De prendre des vitamines et du café. On va lui demander de pousser son corps encore plus loin et on va compenser chaque symptome par une stimulation plus grande de l'organisme.

Quel est la perspective d'un tel mode de vie ? Un épuisement de la personne, mais aussi un prélèvement de ressources médicale et naturelles afin de compenser son expérience négative. Quelle est l'alternative ? Une gestion responsable de la santé et de nos attentes, de nos prétentions.

Si on revient à la politique et à l'économie, la perspective collective est un épuisement des ressources naturelles sans apporter une expérience subjective satisfaisante. C'est aussi l'accumulation d'expériences de vie négatives à travers l'inquisition fiscale et administrative, et la médiocrité des "services publiques" que nous avons fabriqué en collectivisant les expériences négatives de la génération précédente.

Réaction populaire

Cet emballement social arrive à épuisement des ressources économiques et environnementales disponibles. Mais les revendications passionnelles n'ont pas disparue et sont même de plus en plus vives.

Heureusement on assiste a une prise de conscience progressive des peuples. Il faut voir par exemple dans le refus de l'immigration l'acceptation d'une expérience négative afin de faire face à une réalité transcendante, on accepte d'être traité de raciste pour faire face à la l'impossibilité d'accueillir toute la misère du monde.

Le soutient populaire aux politiques sociales plus rigoureuse, par exemple sur l'assurance chômage ou l'aide médicale est un combat philosophique entre d'une part l'immanentisme qui tend à se focaliser sur les expériences vécues jusqu'au mépris du réel et de la raison, et d'autre part le réalisme philosophique qui tend à objectiver et essentialiser les situations et qui impose une réalité humaine naturelle et pré-existante.

Il n'y aura pas de solution au problème des retraites tant qu'elles seront vues sous l'angle de l'expérience humaine. Un être humain si on lui demande ce qu'il préfère, aura toujours envie de vivre plus longtemps en bonne santé, sans effort et sans regarder la facture économique et environnementale.

Euthanasie

Ces desirs sans frein viennnent tôt ou tard s'écraser sur la transcendance de l'économie et de la morale naturelle. Faudra-t'il une guerre pour mettre fin à l'État social ? Peu probable, mais il faudra un choc qui nous aidera à revenir à la réalité.

La succession de victoires électorales conservatrices laisse les immanentistes passifs et pacifiques, enfermés dans leur univers intérieur. Ils aboient dans les médias, mais ne mordent pas. Ils passeront leur temps dans des expériences agréables, sans prise sur un monde dont ils nient l'existence, jusqu'à s'endormir seuls dans une sédation indolore.

Leur monde disparaitra avec toutes les lois irresponsables qu'ils ont suscité, et ils se réveilleront de l'autre côté, c'est là qu'il y aura des pleurs et des grincements de dents.

 


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5 réactions à cet article    


  • chantecler chantecler 3 mars 2023 19:23

    Vous êtes sans doute un humoriste ...

    Mais n’abusez pas des psychotropes .


    • Nicolas Cavaliere Nicolas Cavaliere 4 mars 2023 09:15

      @chantecler

      L’auteur est certainement beaucoup plus sérieux que ça. La forme est obscure, et c’est dommageable pour certains lecteurs, mais il y a une critique constructive au fond. Le « chômage », la « retraite » et la « maladie » ont été figés en catégories de la même façon dont les éléments chimiques ont regroupés dans la table immuable qu’on nous enseigne pendant le cursus scolaire. D’ailleurs, il n’y a plus qu’une seule « école » également, celle de la « République », celle de « l’Etat ». « L’univers humain » dans lequel nous baignons au quotidien est une construction qu’essaie de dénoncer l’auteur à sa manière il est vrai fouillie mais assez rafraîchissante. De temps en temps, il faut savoir dire merde à la perfection.


    • Bernard Dugué Bernard Dugué 3 mars 2023 20:24

      Un petit conseil de lecture

      la mobilisation infinie de P Sloterdijk et tout vous deviendra clair, excepté les racines métaphysiques profondes du processus


      • I.A. 4 mars 2023 10:28

        Texte indigeste pondu par un esprit infatué et quasiment désincarné. Si le fond de votre pensée paraît louable, la forme que vous lui donnez fait peine à voir.

        Parler de l’économie comme d’une loi naturelle, c’est déjà oublier d’où s’extrait l’être l’humain. Et faire de l’ascèse l’unique mode d’emploi de la vie, revient à rejeter autant la diversité que la nature et le divertissement.

        Si les hommes vivent en société, c’est globalement pour surmonter, prévenir ou modifier les lois naturelles les plus frustes — pas pour subir un dogme économique privilégiant les chanceux et les infatués.

        Sinon, monsieur, rétablissons les lois de la nature : ainsi ne resteront que ceux qui cumulent tout à la fois l’intelligence, la force, l’habileté et la vélocité.

        Si une telle société de géants existe, non seulement vous n’en feriez certainement pas partie, mais il vous faudrait encore prier pour que ces êtres-là aient une éthique (ou philosophie, puisque vous lui préférez ce terme) hors du commun.

        Amen.


        • suispersonne 4 mars 2023 11:39

          Il faut reconnaître à l’auteur une virtuosité laborieuse pour masquer ses préjugés.

          On ne sera pas étonné que ce filozofe de pacotille soit rangé parmi les cuistres.

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