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Accueil du site > Culture & Loisirs > Extraits d’ouvrages > L’économique & le vivant

L’économique & le vivant

Le monde économique est-il fou ?

Ou bien est-il notre jouet d'apprentis-sorciers ?

Réchauffement climatique, espèces en extinction, pollutions en tout genre, crises financières, profits fabuleux, chômage, bidonvilles, luxe débridé, malnutrition, gabegie, etc, etc, etc

L’Économique, le Marché, le Libre-Échange sont-ils la source de trop de nos maux ? Ou bien leurs excès sont-ils les spasmes qui proviennent d’un malentendu plus fondamental et plus profond ?

C’est le sujet que j’aimerais aborder ici.

 

Le Marché et le Libre-échange sont régulièrement montrés du doigt.

Mais, qu’a-t-on appris de neuf durant ce dernier demi-siècle pour traiter les problèmes dénoncés ? En fait, pas grand-chose : ce sont toujours les mêmes idées que l’on ressort, re-taille et re-présente, agrémentées des « petits légumes de saison » du moment.

Les problématiques fondamentales ont pourtant été identifiées il y a longtemps. Mais nous sommes semble-t-il incapables de les affronter et traiter utilement.

 

Pour l'illustrer, j’essaie ici de « faire commenter » mon propos par une sélection de quelques auteurs (principalement René Passet), qui ont été publiés voici environ un demi-siècle ou davantage. Ce sont des auteurs de sensibilités très variées, et je n’utilise donc que les aspects de leur discours qui vont dans le sens de mon propos. Aussi, je n’utilise que les auteurs dont les idées sont exprimées explicitement : sans nécessité donc pour moi de rajouter des commentaires.

 

 

Le plan est le suivant :

A - L’ordre prédominant des choses économiques

B - Observations et critiques sur cet ordre des choses

C - Sortir des rails, changer de cap, est-ce possible ?

B1 - En annexe : quelques approfondissements sur le point « B »

 

 

A – L’ORDRE DES CHOSES ÉCONOMIQUES qui prédomine actuellement

 

J’ai retenu Léon Walras pour décrire cet ordre des choses économiques (Théorie mathématique de la richesse sociale – 1883) :

« Nommons RICHESSE SOCIALE l’ensemble de toutes les choses matérielles ou immatérielles, nécessaires ou superflues, qui peuvent avoir une valeur et qui peuvent S’ÉCHANGER. »

« La théorie mathématique de l’ÉCHANGE (…), c’est l’expression mathématique de ce mécanisme de la libre concurrence. »

« (…) le fait de la VALEUR d’ÉCHANGE est un FAIT NATUREL et comme tel nécessaire comme les faits de la pesanteur, de la chaleur, de la lumière, de l’électricité, du magnétisme, de la végétation, de la vie, comme tous les faits physiques et physiologiques. »

« Reconnaître les faits économiques naturels, les décrire, les analyser, les classer, EN CONSTATER LE CARACTÈRE DE FATALITÉ INÉVITABLE, tel est la partie théorique de l’économie politique ; et quant à l’application pratique de la science,elle se résume tout entière dans LA PRESCRIPTION UNIQUE DE RENDRE LA PRATIQUE SOCIALE CONFORME AUX INDICATIONS NATURELLES. »

 

 

B – OBSERVATIONS et CRITIQUES

 

René Passet (L’Économique et le Vivant – 1979) résume cette vision en soulignant que la croyance en un caractère "naturel" de l’économie fait que « (…) ses lois générales et universelles s’imposeraient à tous, quelle que soit la diversité des systèmes » économiques.

Et que, de ce fait, « le libéralisme (…) serait en quelque sorte DANS LA NATURE DES CHOSES . »

Passet rappelle que « Walras définit l’économie pure comme la théorie de la détermination des PRIX sous un régime hypothétique de libre concurrence absolue. »

Et que de ce fait, « (…) l’économie débouche sur une simple contemplation de ses équilibres internes, abstraction explicitement faite de tout ce qui concerne LE VIVANT. »

« Ce qui se trouve mis en cause, c’est le primat de l’économique posé comme finalité des conduites individuelles et critère ultime des grandes décisions politiques. »

« Or, l’économique (…) est par essence transformation de la nature. »

L’erreur fondamentale de raisonnement que souligne Passet est que «  (…) les éléments de la sphère économique appartiennent à la biosphère et obéissent à ses lois, mais tous les éléments de la biosphère n’appartiennent pas à l’économique, et ne se plient pas à ses régulation. »

Passet le schématise très bien dans son livre :

Ouvrage « L'économique et le vivant » René Passet - 1979 / Le terme "biosphère" est à comprendre dans le sens écologique, c'est-à-dire qu'il comprend l'inanimé.

 

« Le caractère déterminant (…) conféré à l’économique a pour effet de soumettre l’homme et la nature à une loi qui n’est pas la leur. »

« L’ordre cohérent de la biosphère (…) se trouve placé, en fait, sous la dépendance d’un de ses sous-systèmes.  »

« C'est donc dans les limites des contraintes liées à la reproduction du vivant que se situe le champ légitime du calcul économique. »

 

Bien sûr, «  (…) cette redécouverte de la dépendance des hommes envers les phénomènes naturels ne saurait être envisagée comme le simple retour à une soumission aveugle à des forces magiques. C’est en fait de connaissance qu’il s’agit : connaissance en vue d’une harmonisation consciente, effectuée DANS LE RESPECT DES RÉGULATIONS ET DES COHÉRENCES NATURELLES sans le maintien desquelles les sociétés humaines ne sauraient espérer de lendemain. »

 

René Passet n’était ni le seul ni le premier à percevoir la nécessité d’une vision intégrée et cohérente de l’économique avec le vivant :

 

Alfred Marshall disait que «  (…) l’économique est une science de la vie, voisine de la biologie plutôt que de la mécanique. » (Principes d’économie politique – 1890).

Mais la logique qui a finalement prévalu est bien celle, mécanique, mathématique, de l’équilibre offre/demande par le prix !

 

Karl Marx et Friedrich Engels, eux non plus, dans leurs échanges de correspondance scientifique, ne dissocient pas l’économique de l’ensemble des phénomènes naturels (ref. par ex. lettre de Marx du 13 février 1866).

Mais, de la vision « marxienne » du théoricien, n’est resté finalement que la pensée « marxiste », plus étroite/étriquée (Marx ne disait-il pas :«  moi, je ne suis pas marxiste ! »).

 

 

En fait, les formules mathématiques forment l’architecture du raisonnement économique, et emportent facilement l’adhésion, car la logique interne du raisonnement est imparable et les résultats des formules sont le plus souvent techniquement incontestables.

Cependant, là se cache pourtant la faille : nous prenons la PRÉCISION pour de l’EXACTITUDE !

 

Herbert Marcuse, psycho-sociologue le dit à sa manière :« Ainsi, on a eu l’illusion que la mathématisation de la science créait une ''vérité absolue, autonome’’, alors qu’en réalité (elle) donne des représentations du monde (…) et le masque en même temps. » (L’homme unidimensionnel – 1968)

 

 

C - SORTIR des RAILS, CHANGER de CAP ?

 

Alors, après que l’homme a intégré tous ces éléments (et bien d’autres non repris ici) est-il prêt à changer de cap ? Non, malheureusement.

 

Le naturaliste Américain Henry Fairfield Osborn (La planète au pillage – 1948) affirme que «  (…) nous sommes en train de suivre une voie qui risque de rendre un jour ou l'autre notre bonne vieille terre aussi morte que la lune. »

A son propos, Albert Einstein écrivait : « En lisant ce livre, on sent de façon aiguë la futilité de la plupart de nos querelles politiques, comparées aux réalités profondes de la vie. »

 

Osborn (tout comme Vogt, aussi en 1948) proposait comme "solution" le développement de la recherche scientifique et la diffusion des connaissances. Ces deux éléments, mis au service de son intelligence, devaient amener l'humanité à prendre les mesures qui s'imposent.

C'était il y a 70 ans.

La recherche et la diffusion du savoir ont fait un bond énorme depuis. Mais ils ont été mis au service d'un "pillage" plus méthodique, plus scientifique des ressources.

Cette solution n'a donc pas fonctionné.

 

 

René Passet explique que « L’homme est réduit à ses deux fonctions de travailleur consommateur, dans une société où le pouvoir social l’incite en permanence à consommer davantage, donc à travailler plus. »

« (…) c’est l’homme qui clairement se retrouve au service de l’appareil économique. »

On peut effectivement dire que l’homme est en grande partie devenu un INGRÉDIENT du système économique qui l’alimente : il ne peut individuellement s’extraire du système sans s’exclure socialement.

 

Passet poursuit en expliquant qu'il faudrait définir « (...) les conditions d'une insertion durable des activités humaines dans le milieu qui les porte (...)  » et respecter les régulations de la biosphère «  ( ...) qui constituent donc un ensemble de contraintes dans le respect desquelles doit se maintenir le calcul économique. » C'est « l'approche bio-économique  » qui permettrait «  l 'intégration à la biosphère » des activités humaines.

 

Mais, pourquoi l'individu choisirait-il de changer radicalement son mode de vie et renoncerait-il à son intégration dans un groupe social dont les Valeurs principales -qui sont aussi les siennes- sous-tendent l'architecture et l'harmonie du-dit groupe et son imbrication dans le système économique qui le nourrit et le maintient ?

 

 

Après avoir parlé de « (…) violation commerciale de la nature  », Herbert Marcuse observe qu’« (…) il ne suffit pas de comprendre que le changement est nécessaire pour rendre possible une évolution différente. »

Il poursuit en assénant que «  La théorie critique de la société ne possède pas de concepts qui permettent de franchir l’écart entre le présent et le futur. » !

 

En effet, un monde futur, réellement respectueux de la biosphère, fonctionnerait nécessairement avec des ressorts TRÈS différents de ceux, actuels en occident, qui expriment des VALEURS qui nous semblent aujourd’hui belles et bonnes. Ces Valeurs qui sont les nôtres sont toutes issues d'un passé plus ou moins lointain, et sont différentes de celles adoptées en d'autres points du globe. Pourquoi nos valeurs occidentales d'aujourd'hui seraient-elles toutes adaptées à un monde futur très différent ? 

Les Valeurs évoluent lentement avec les siècles. Les changements infligés à la biosphère se sont accélérés de manière exponentielle : l’arc temporel disponible est très court, avant d’arriver à un « mur » de non-retour pour les écosystèmes. Les sociétés ne pourront voir évoluer leurs Valeurs « naturellement » en si peu de temps.

 

 

Pourtant, certains ont rêvé de nouveaux rivages…. 

Frédéric Bastiat assure que « La véritable richesse des hommes est constituée par les avantages que leur dispense gratuitement la nature et non par les efforts qu’ils doivent assumer pour se les procurer. » ( Les Harmonies Économiques – 1850)

 

‘Témoignage Chrétien’, dans son commentaire sur l’ouvrage de Passet dit : « Voilà un ouvrage sans précédent, qui rétablit enfin le lien entre la vie et une économie qui, par une curieuse déviation de son sens, est devenue une fin en soi, au lieu d’être outil au service du vivant.  »

Commentaire resté bien sûr sans effet sur le cours des choses…

 

 

Les rivages de Raison et d’Harmonie semblent effectivement bien inaccessibles… puisque pour les atteindre, il aurait fallu trouver un moyen d’adhérer progressivement à des Valeurs autres, cohérentes avec une structure sociale/économique respectueuse des mécanismes et des rythmes de la biosphère.

 

Nous ferons donc comme l'humanité a toujours fait : un ajustement subi, devant des modifications importantes de l'environnement. 

Il n'y a pas à s'en plaindre : c'est le processus normal de l’Évolution, qui concerne tous les êtres vivants, et qui poursuit sa marche inexorable.

L'évolution , n'a pas de "sens" ni de "but", et elle s'éteindra avec le dernier être vivant.

 

 

 JPCiron  (sept. 2013)

§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§

B1 – Quelques brefs Approfondissements

 

En réaction aux problèmes induits par l’économique, une pratique fréquente consiste en l’érection de réglementations et de régulations.

Cependant, ces régulations visent plus à réduire les inconvénients, sans toucher au fondement de la problématique (le problème de fond est que la biosphère se trouve placée sous la dépendance d’un de ses sous-systèmes : l’économie).

Au mieux, les régulations freinent un peu les processus dans le court terme humain, sans en changer le flux ni les impacts fondamentaux au niveau biosphère. Aussi, ces régulation ne sont généralement mises en place qu'après que le problème se soit "installé dans la place".

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

L’expression mathématique de la théorie économique est construite sur une hypothèse implicite : la rationalité de l’homme. Or, les différentes zones du cerveau agissent comme « (…) sous-systèmes d’une machine polycentrique. » (E. Morin- 1973) « De telle sorte que toutes, alternativement ou simultanément, influencent les actes. Dès lors, les comportements économiques sont faits de raison, de pulsions, d’arguments vrais et d’alibis, de logique et de contradictions, de calculs et d’affectivité, de lucidité et de soumission à des tabous, manifestations de l’esprit humain qui sont toutes également inhérentes à l’expression de l’être. » (Passet – 1983).

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

L’Economique et la Biosphère fonctionnent en modes contradictoires :

· La biosphère va maximiser les flux d’énergie venant du soleil pour fabriquer un stock de biomasse. (flux >> stock)

L’économique va optimiser les flux de production en provenance d’un stock de biomasse. (stock >> flux)

· Enfin, au niveau temporel, il faut très peu de temps à l’économique pour exploiter un stock issu de la biomasse (vivant ou fossile), tandis que la construction de ce stock est beaucoup plus long et est conditionné par toute une série de limitations propres aux êtres vivants.

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L’économique dégrade nécessairement le rendement de la biosphère :

· L’aptitude d’un écosystème à se reproduire dans le temps est fonction de sa diversité.

· Or, la loi économique du rendement conduit à la sélection et à la spécialisation.

En outre, la rupture de régulations dans la biosphère entraîne le dérèglement de mécanismes dont dépend la survie des espèces. Un économique fort dégrade le rendement de la biosphère.

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L’économie a des effets négatifs sur la biosphère (pesticides, engrais, plastiques, toxiques,…).

Cependant, ces effets ne touchent pas (ou peu) le bilan des entreprises : il est donc normal qu’elles n’en tiennent pas compte. De ce fait, les coûts sont supportés par la collectivité humaine quand il y a réparation/nettoyage. 

Sinon, cela affecte durablement la biomasse.

 

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 1979

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Moyenne des avis sur cet article :  4.06/5   (17 votes)




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30 réactions à cet article    


  • Claude Courty Claude Courty 14 août 2023 16:23

    « Tout être humain est avant toute autre activité ou toute autre considération un consommateur » Gaston Bouthoul (1896-1980), in Traité de sociologie, éditions Payot 1968, tome II, p.180. Et parce qu’il doit impérativement se nourrir, se vêtir, se loger et se soigner, il l’est depuis sa conception jusqu’après sa mort, comme en attestent les marchés du prénatal et du funéraire. Il se double ensuite d’un producteur, dès qu’il est en âge de travailler, devenant ainsi un agent économique au service de la société, mais aux dépens de son environnement.

    Plus le nombre de ces agents a augmenté au cours des millénaires, plus leurs besoins se sont accrus, outre ceux qu’ils se sont inventés toujours plus nombreux, plus ils ont produit, consommé ; ont échangé et se sont enrichis, avec l’aide du progrès scientifique et technique, quelles que soient les conditions du partage de leurs richesses. Qu’il s’agisse de gestion de ressources non renouvelables comme de déchets, ou de pollution, les atteintes à l’environnement ont ainsi toujours augmenté avec la population humaine, ses besoins et leur industrie telle que nécessaire à leur satisfaction, ajoutant de la sorte aux effets des caprices d’une nature jamais avare de catastrophes inopinées ou cycliques.

    Tous les malheurs du monde que l’homme a la capacité de maîtriser en découlent et sont aggravés par le caractère incontournablement pyramidal de sa société, selon lequel :

    1° – Les hasards de sa naissance et l’héritage génétique, social et culturel qui en résulte, assignent à chacun sa place au sein de cette pyramide sociale, quels que soient : les aléas heureux ou malheureux de son existence par la suite ; les effets de la compassion la plus sincère éprouvée pour les plus déshérités ; les corrections et compensations que puisse offrir la société à ces derniers

    2°– Richesse et pauvreté existent l’une par l’autre, dans leur relativité. Sans riches point de pauvres et réciproquement.

    3° – Pour des raisons purement structurelles, toujours liées au caractère pyramidal de toute société fondée sur l’interdépendance hiérarchisée de ses membres, comme l’est celle de l’humanité, les pauvres s’y multiplient à une cadence qui est moyennement 6 fois celle des riches.

    C’est dans ces conditions, que sous la pression des centaines de milliers d’êtres humains qui viennent de nos jours s’ajouter quotidiennement à leur population mondiale, leur pyramide sociale s’atrophie toujours plus et que son sommet s’éloignant incessamment de sa base, les écarts de richesse entre ses occupants se creusent inéluctablement d’autant.

    Or les êtres humains, en dépit de la conscience qu’ils ont d’eux-mêmes – à moins que ce soit précisément pour cette raison – prêtent peu attention à ces réalités. Sous l’emprise croissante de sentiments et d’émotions que leur dictent d’obscures peurs ataviques et une angoisse existentielle augmentant avec le nombre et les difficultés de gouvernance qui en découlent, ils préfèrent, à l’observation de faits et chiffres incontestables, les dogmes lénifiants de croyances religieuses fondées sur le mystère et les certitudes de doctrines politiques et sociales qui en tiennent lieu pour les laïcs. Ceci d’autant que depuis qu’ils existent, certains d’entre eux ont compris les avantages qu’ils pouvaient tirer, de cette spiritualité – faculté par laquelle chacun tente de s’expliquer ce qui lui est inaccessible et que seule une patiente démarche rationnelle semble en mesure de révéler.


    • JPCiron JPCiron 14 août 2023 17:17

      @Claude Courty

      Bonjour,

      Merci pour cette intéressante contribution.

      Plusieurs points méritent d’être soulignés.


      < Tout être humain est avant toute autre activité ou toute autre considération un consommateur >

      C’est une opinion très réductrice, qui place l’économique comme ’’maître’’ du Système terrestre dans lequel l’humain évolue. Ce système économique étant alimenté par les ressources ’’mises à disposition’’ ( prélevés dans l’environnement ).

      C’est une approche typiquement Chrétienne (Genèse 1 : 24-30)


      Méthodologiquement, cette approche s’enferme dans un carcan logique dont on ne peut s’extraire sans rejeter les hypothèses de base. C’est pourtant ce qu’il convient de faire.

      L’humanité fait partie du vivant. C’est un des élément parmi les autres. Tous les êtres vivants font partie du biologique, et sont soumis aux mêmes lois physico-chimiques.

      Dès l’instant où les règles humaines (croyances religieuses ou théorie économique) en viennent à dégrader substantiellement l’environnement qui fait vivre le vivant, il convient de les changer.


    • Claude Courty Claude Courty 15 août 2023 13:51

      @JPCiron

      L’économique ne saurait être, à lui seul, « maître du Système terrestre ».
      Il l’est avec son déterminant qu’est l’être humain – consommateur-producteur –, dans l’indissociable binome économie/pupulation. 

      https://pyramidologiesociale.blogspot.com/2015/03/schema-sans-commentaire.html


    • JPCiron JPCiron 15 août 2023 15:35

      @Claude Courty

      L’économique ne saurait être, à lui seul, « maître du Système terrestre ».
      Il l’est avec son déterminant qu’est l’être humain – consommateur-producteur –, dans l’indissociable binome économie/pupulation. >

      Ce binôme (en fait un polynôme) ressemble fort à un mononôme puisque l’être humain est ou produit tous les termes ’’indissociables’’ du raisonnement. Et qu’il n’intègre pas l’environnement (dont il constitue un sous-ensemble) ni les propres règles non-humaines qui régissent cet environnement.

      C’est une approche courante. C’est pourquoi " On peut ainsi se demander si nos sociétés sont capables ou non d’intégrer à leur réflexion une éventualité aussi radicale que celle de leur propre fin." (*)
      Elles ne le sont pas, et votre propos en illustre le pourquoi.
      °°°°°°°°°°°°°°°
      (*) - Luc Semal« Fairfield Osborn, La planète au pillage », Études rurales [En ligne], 184 | 2009, mis en ligne le 01 janvier 2011, consulté le 15 août 2023. URL : http://journals.openedition.org/etudesrurales/10592 ; DOI : https://doi.org/10.4000/etudesrurales.10592


    • Claude Courty Claude Courty 16 août 2023 17:56

      @JPCiron

      Confirmeriez-vous :
      - Que vous refusez à l’être humain sa place de premier prédateur de son environnement, composé de la planète qui l’abrite et du vivant qui la peuple avec lui ?
      2° - Que vous contestez que l’économie soit un système né de la satisfaction des besoins de l’espèce humaine, et qui se développe depuis l’apparition de celle-ci en raison des fonctions de consommateurs et de producteurs de ses représentants, agissant proportionnellement à leur nombre croissant sans cesse ?

      https://pyramidologiesociale.blogspot.com/2020/01/du-binome-economie-population.html

      Quant à concevoir que notre société soit promise à une fin, pour qui n’est-ce pas une évidence, ne serait-ce qu’à voir le train où vont les choses ?


    • JPCiron JPCiron 16 août 2023 18:38

      @Claude Courty

      1

      L’humain ’’moderne’’ issu du schéma de fonctionnement occidental (ou de la copie-suivisme de ce dernier) est effectivement le principal problème pour la survie du vivant en général, y compris donc l’humain, moderne ou non.


      2

      Trop souvent, nous regardons le monde avec nos propres yeux-oeillères.

      « L’anthropologie révèle que ce que nous considérons comme ’’naturel’’, fondé sur l’ordre des choses, se réduit à des contraintes et à des habitudes mentales propres à notre culture. » (*)


      Depuis le début de l’humain, voici quelques millions d’années, il y a eu des échanges, qui ne fonctionnaient nullement avec nos logiques ’’modernes’’. A voir l’échec flagrant de ’’l’expérimentation moderne’’, il faut regarder avec moins de condescendances ces cultures dites ’’primitives’’ qui ont néanmoins su préserver globalement leur environnement et survivre depuis la nuit des temps.


      Les sociétés dites primitives «  offrent le seul modèle pour comprendre la façon dont les hommes vécurent ensemble durant une période historique correspondant sans doute à 99% de la durée totale de vie de l’humanité et, du point de vue géographique, à une époque encore récente, sur les trois quarts de la superficie de la terre habitée. » (*)


      « Dans les sociétés anciennes (...) il est le plus souvent impossible de séparer les aspects que nous appelons économiques de tous les autres. (...) Des actes qui, pour nous, auraient un caractère purement économique traduisent des préoccupations tout à la fois techniques, culturelles, sociales et religieuses. » (*)


      Voir aussi l’intéressant lien de @Enki sur le don et l’échange dans les sociétés archaïques :

      https://anthropomada.com/bibliotheque/Marcel-MAUSS-Essai-sur-le-don.pdf


      « La première leçon de l’anthropologie en matière économique, c’est donc qu’il n’existe pas une seule forme d’activité économique mais plusieurs, qu’on ne peut pas ordonner sur une échelle commune. Elles représentent des choix entre des solutions possibles. (*)


      Nos problèmes modernes ont à voir avec la structure de son fonctionnement (nos principes – valeurs) qui est incompatible avec l’architecture de fonctionnement global du vivant.

      Et nos règles occidentales pour ’’l’économique’’ correspondent aux croyances fondamentales des religions du Livre. C’est là que le bât blesse, aussi...


    • Claude Courty Claude Courty 18 août 2023 17:43

      @JPCiron

      Contrairement à votre affirmation, il existe bel et bien une échelle commune aux économies primitives et actuelle. Elle est celle des ressources nécessaires à leur fonctionnement, dont nous savons que l’humanité a consommé en 2023, en moins de six mois, ce que la Terre lui offrait pour l’année entière .

      Dans les sociétés primitives comme dans la moderne, chaque être humain s’est toujours distingué par les hasards de sa naissance et son héritage génétique, social et culturel, quels que que soient les aléas de son existence par la suite. Et ça a été le cas des sociétés primitives tant qu’elles ne se sont pas exonérées de la loi de sélection naturelle, dont l’effet majeur était d’en réguler la démographie – comme pour les autres espèces, jusqu’à ce que l’homme s’en mêle –, avec toutes conséquences sur leurs besoins et la gestion des ressources nécessaires à leur subsistance.

      Puis l’économie est devenue un système au service et aux mains de l’homme. C’est ainsi qu’elle a perdu son caractère naturel, au sens premier du terme, par l’exercice de la volonté humaine et de sa capacité de toujours améliorer sa condition qui le distinguent des autres espèces animales, et qu’il l’a organisée, depuis l’extraction jusqu’à la transformation et la consommation des ressources propres à satisfaire ses besoins, puis leurs échanges, dépassant le troc par l’invention de ce facilitateur que furent et demeurent les monnaies et autres moyens de paiement.

      Depuis, sous l’effet d’un progrès scientifique et technique considérable, ayant favorisé un accroissement incontrôlé de sa population, assorti de ses besoins, vitaux et superflus, est apparue la mondialisation, qui n’est rien d’autre qu’une économie démesurée, achèvant le pillage de la planète.

      L’histoire de l’humanité se confond de la sorte dorénavant, chaque jour plus étroitement, avec celle de l’indissociable binôme population/économie, celle-ci étant conditionnée par celle-là, et non l’inverse.


    • Claude Courty Claude Courty 19 août 2023 14:46

      @Claude Courty

      Omission 
      Voir, au sujet du 1er § de mon post ci-dessus :
      « Notre empreinte écologique »
      Mathis Wackernagel, Wiliam Rees
      Éditions « écosociété »  Montréal  2008


    • JPCiron JPCiron 19 août 2023 15:59

      @Claude Courty

       il existe bel et bien une échelle commune aux économies primitives et actuelle. Elle est celle des ressources nécessaires à leur fonctionnement >
      Cette échelle ’’de base’’ est commune à tous les êtres vivants, animaux, végétaux, etc...

      l’économie est devenue un système au service et aux mains de l’homme. C’est ainsi qu’elle a perdu son caractère naturel 
      En fait, l’homme fait partie de la nature...

      < l’indissociable binôme population/économie, celle-ci étant conditionnée par celle-là, et non l’inverse. >
      Tant les populations que les économies sont le résultat d’une myriade d’actions souvent appuyées sur des Principes que sous-tendent des Valeurs. Les entrelacements de ces valeurs sont leurs moteurs premiers.


    • Claude Courty Claude Courty 19 août 2023 21:02

      @JPCiron

      Le malheur étant au bonheur ce que la richesse est à la pauvreté, si les moteurs sont partie d’un ensemble la direction et les pilotes en sont d’autres, mais quels que soient ces derniers et leurs « valeurs », nous voyons le niveau de malheur où ils ont conduit l’humanité et tout ce qui en a dépendu, en attendant la fin à plus ou moins long terme pour tout et tous.

      Bonsoir.


    • Claude Courty Claude Courty 22 août 2023 12:03

      @Claude Courty

      Correctif

      Le malheur étant au bonheur ce que la richesse est à la pauvreté, si des moteurs entraînent nécessairement un ensemble dynamique comme l’Économie, ce sont ses pilotes qui en déterminent l’évolution. Or, quels qu’aient été de tous temps leurs valeurs de référence, nous voyons le niveau de malheur où ils ont conduit l’humanité et tout ce qui en dépend depuis toujours, en attendant la fin à plus ou moins long terme pour tout et pour tous.

      Bonsoir


    • JPCiron JPCiron 22 août 2023 13:02

      @Claude Courty

      < un ensemble dynamique comme l’Économie, ce sont ses pilotes qui en déterminent l’évolution. >


      Je dirais plutôt que ses pilotes contribuent à en influencer l’évolution, laquelle reste toujours incertaine à court terme, ne serait-ce que du fait des pilotes adverses. Il y a aussi ce que Zoroastre appelle ’’le Destin’’ qui sont les méga interactions physico-chimiques imprévisibles au niveau humain (changement de courants marins, tremblements de terre, comète, … que sais-je)


      Mais il est vrai que, sans la puissance du système économique occidental (dans lequel la Chine et d’autres commencent à intervenir lourdement) , notre futur serait moins sombre à moyen terme.


      Il n’empêche qu’un des acteurs centraux dans cette affaire ne sont pas directement économiques : ce sont les fondamentalistes (principalement Chrétiens Américains) qui veulent absolument ’’aider Dieu’’ à accélérer la fin du monde. Plus il y a d’incendies dans le monde, et plus il y a de catastrophes, plus ils lisent ces événements comme des signes envoyés par Dieu leur montrant qu’ils sont sur le bon chemin. Il leur suffit donc de continuer en roue libre sans besoin de réagir face aux désastres qui s’accumulent.

      Et ces zozos forment plus du tiers des électeurs là-bas...



    • zygzornifle zygzornifle 15 août 2023 08:04

      Heureusement que l’énarque est la, avec son gros cerveau et ses petites mains il va tout remettre dans le droit chemin ...... lol


      • Enki Enki 15 août 2023 10:01
        Oiko-nomos : la gestion de la maison. Le mot écologie est un pléonasme qui vient en doublon du mot économie.

        En fait, c’est de l’extractonomie que développent les humains et sans doute qu’on a inventé une science pour mieux se mentir en disant qu’on fait de l’économie.

        L’humain est un faber : il est le seul être du monde vivant à disposer de mains et donc à pouvoir fabriquer. Pas tout à fait, puisque les singes et lémuriens on ces mêmes extrémités articulées et préhensibles. Mais leur pouce de pied est écarté : il sert aussi à pincer, mais gène pour la marche. Or, pour fabriquer il faut pouvoir marcher pour rapporter les provisions nécessaires aux fabrications.

        Deux ouvrages me semble-il portent sur l’économie, pas simplement sur l’extractologie.

        Essai sur le don. Formes et raisons de l’échange dans les sociétés archaïques. Marcel Mauss.

        Il n’y a pas de « don gratuit », c’est une mauvaise fabrication de la pensée sur ce concept. Quand on est invité chez des amis, on serait gêné d’y venir sans une bouteille, le dessert, ou des fleurs. Et c’est la vertu du don : elle créé la dette et le contrat social. Le don génère le contre don et ouvre un cycle, même une spirale d’échanges. L’échange est comme un fil qui fait le tissu : il tisse une société.

        L’autre ouvrage explique comment on fait de l’anti-économie, de l’extractologie. C’est La Grande Transformation de Karl Poanyi. Il explique le désencastrement, comme une vis sans fin. L’humain est extrait progressivement de son milieu d’existence qui fournit naturellement ses besoins : les clôtures ont acapparé les terres communes, le travail pour vivre a été transformé en salariat, la monnaie comme gage d’échange est devenu elle-même une marchandise. C’est la transformation progressive des échanges en marchés. L’humain est progressivement dépossédé de lui-même. Un étape récente, on l’a vue est notre sang : il devient obligatoire de le céder au injections qui font les affaires de ses fabricants et fait du soin une marchandise. 

        Tout cela ne se voit pas bien, car l’extractonomie a les toutes les apparences pour elles : elle apporte du confort dans la vie des humains, particulièrement depuis la révolution industrielle. Mais au bout, il y a le mur, celui de l’épuisement (matériel comme mental). Car nos pensées vont avec, elles sont sorties du milieu naturel, qui a ses lois de régénération à comprendre et admettre, et qui est notre milieu premier de développement à nos existence.

        J’ajoute Amartya Sen, le créateur de l’IDH et son mot-valise : la capabilité. L’économie, pour lui, est la capacité d’une humain à assurer ses moyens d’existence, pour lui comme pour sa famille. Encore faut-il qu’il en ait la possibilité et que les ressources matérielles et intellectuelles lui soient accessibles : que sa capacité soir aussi capabilité. La réflexion porte sur la société : si les moyens économiques sont accaparés par une classe héritière, il n’y a pas de capabilité. 

        • JPCiron JPCiron 15 août 2023 13:34

          @Enki

          Bonjour,


          Merci pour le lien « Essai sur le don. Forme & raison de l’échange dans les sociétés archaïques. » https://anthropomada.com/bibliotheque/Marcel-MAUSS-Essai-sur-le-don.pdf

          Je le vais lire.


          < faber >

          Oui, plusieurs singes utilisent des pierres de formes différentes pour décrocher un coquillage ou pour casser plus tard une noix. Certains poulpes dévissent un bocal ou transportent un déchet comme protection ou camouflage. Il faudrait encore quelques millions d’années pour que l’évolution sélectionne -ou pas- pour eux quelque chose genre faber.


          < économie >

          C’est donc de l’extractologie. Un mot que je vois pour la première fois.

          Il est clair que le sens habituellement donné au terme économie est étranger au concept de gestion de la maison-monde.

          Lévi-Strauss disait que, dans les sociétés anciennes, ce que l’on appelle ’’l’économie’’ était une des multiples facettes d’une réalité complexe derrière l’échange, qui comprenait des préoccupations religieuses, sociales & culturelles, autant que techniques. Ce n’était pas du simple ’’commerce’’ mais constituaient des actes de la vie en société.

          Une richesse présente chez les sociétés ’’primitives’’ que nous avons perdu.


        • JPCiron JPCiron 15 août 2023 16:44

          @Enki

          https://anthropomada.com/bibliotheque/Marcel-MAUSS-Essai-sur-le-don.pdf >

          Très intéressant cet essai. 

          Dans ces sociétés ". Tout parle, le toit, le feu, les sculptures, les peintures ; car la maison magique est édifiée non seulement par le chef ou ses gens ou les gens de la phratrie d’en face, mais encore par les dieux et les ancêtres ; c’est elle qui reçoit et vomit à la fois les esprits et les jeunes initiés.« (...) »Ainsi les choses sont confondues avec les esprits, leurs auteurs, les instruments à manger avec les nourritures."
          Tout est lié : le matériel, le spirituel, la tradition, le geste, l’objet,...
          Lévi-Strauss parlait par ailleurs de notre l’indigence en ce domaine, comparé à ces sociétés ’’primitives’’.

          Le texte nomme les trois obligations : donner, recevoir, rendre.
          Tout est centré sur la solidité de la structure sociale. « le système des dons échangés envahit toute la vie économique et tribale et morale des Trobriandais. »

          Et cela me rappelle une anecdote de Godelier (ref. La production des grands hommes) sur les Baruya de Papouasie-Nouvelle guinée, emballés par le jeu du football importé par un missionaire. Le problème apparaît à la fin de partie où il n’est pas possible qu’une équipe gagne... et le jeu se poursuivait jusqu’à parvenir à une égalité.

          Tout cela dénote un état d’esprit et des Valeurs fondamentales dont nous gagnerions à nous inspirer...


        • Enki Enki 16 août 2023 05:58

          @JPCiron

          Oui, le don contre don est le principe de réciprocité générateur de tout échange et de toute sociabilité. L’Essai sur le don est un classique que connaît tout anthropologue, ethnologue, sociologue et les économistes qui ont bénéficié un tant soi peu de culture durant leur formation.


        • JPCiron JPCiron 18 août 2023 07:44

          @Enki

          Oiko-nomos : la gestion de la maison. Le mot écologie est un pléonasme qui vient en doublon du mot économie. >

          Il me seùble que, dans le langage courant, l’écologie est la gestion de la grande maison (celle du vivant et de son environnement), tandis que l’économie est la gestion de la petite maison des humains.
          Cette dernière étant imbriquée dans l’autre, mais prétendant suivre ses propres lois philosophiques.


        • Enki Enki 18 août 2023 22:17

          @JPCiron

          J’ai vu mais je n’ai pas le temps, je répondrai. Laissez-moi 24 heures, environ (peut-être un peu plus...)


        • Enki Enki 19 août 2023 13:35

          @JPCiron

          Le mot récent écologie complète un impensé du mot économique : il n’y a qu’une planète, on est nombreux dessus, il va falloir penser à la préservation des écosystèmes, générateurs des êtes vivants. C’était aussi la question des capitaines d’industries à Dennis Meadows en 1972 si la croissance était indéfinie, sa réponse : non. C’est un impératif paradigmatique récent.

          La rotondité de la terre est connue au moins depuis l’antiquité. Les humains ont aussi pas mal circulé bien avant : le déversement de populations en Europe depuis l’Afrique, le détroit de Béring franchi à pied sec par les Asiatiques pour aller s’installer dans les Amérique, toutes les terres du Pacific occupées jusqu’à Madagascar par les Austronésiens depuis Taïwan. Mais la pensée était faite du connu (notre territoire de vie) et de l’étrange : les fameuses terres inconnues. L’idée d’une planète unique, c’était formel, un simple imaginaire, un rapport spirituel : à défaut de contrôler, on respecte la nature, alors elle nous pourvoie.

          Oikonomikós est le titre de l’ouvrage de Xénophon, traduit par Etienne de la Boétie. C’est un traité de gestion d’un domaine agricole, sans doute 15000 ha : le sien. L’ouvrage comprend la gestion parcimonieuse du patrimoine, l’ordre de fonctionnement nécessaire à obtenir avec son épouse, les serviteurs, les outils, les chevaux, savoir bien se faire obéir par l’exemple, des instructions pertinentes et adaptées, les techniques agronomiques. C’est une activité supérieure à l’artisanat.

          La référence, explicite comme implicite dans l’œuvre de Xénophon est Les travaux et les jours d’Hésiode, l’un des premiers présocratiques du monde Grec. On connaît les cinq races, ou âges de l’humanité, aussi l’âge d’or. L’âge d’argent est déjà dégradé, à cause de l’hubris que les humains doivent réparer par le travail. En fait, c’est l’harmonie entre la nature, les dieux et les vertus personnelles qui permettent de réduire le travail : l’idée de Xénophon étant qu’une bonne économie est inscrite dans un bon ordre cosmique.

          On sait la séparation matière/esprit, le dualisme antagoniste apporté par les penseurs scolastiques du Moyen Age : réduction de l’économie au matériel, à l’inerte, à l’utilitarisme.

          Deux écoles de pensées sont devenues apparentes depuis la Renaissance : les physiocrates et les mercantilistes.

          Physiocrates : la vraie richesse est l’agriculture, par extension la production dégagée, fabriquée. Le foncier, le patrimoine, la propriété sont les valeurs essentielles. Le propriétaire est maître chez lui, patrimoine= patrie. Le despotisme éclairé est d’essence physiocrate.

          Mercantiliste : la valeur se trouve dans le bien d’échange, c’est le commerce qui procure les bienfaits nécessaires à l’existence.

          On voit bien ici la préfiguration géopolitique des thalassocraties contre les télurocraties.

          Autre opposition intéressante : Adam Smith versus Thomas Maltus.

          Adam Smith : l’augmentation de la population signifie augmentation des échanges et des richesses pour tous et chacun.

          Thomas Maltus : augmentation de la population signifie décrochage avec l’augmentation des ressources possibles à extraire et paupérisation.

          Un bon chemin, me semble-t-il pour remettre l’économie (la vraie) et les pensées avec dans le bon ordre : revenir à l’agriculture, aux nourritures terrestres.

          Agriculture extensive = augmenter un rendement à l’ha (ex : passer de 50 à 80 tonnes de blé à l’ha). Valorisation : intrants chimiques et transgénèse.

          Agroécologie (ou autre terme équivalent) = augmenter une productivité à l’ha (augmenter le nombre de fruits, légumes, oléagineux, céréales à ha). Valorisation : la puissance fertile de l’écosystème déjà vivant et l’évolution des variétés aux réalités géoclimatiques par croisements naturels.


        • Xenozoid Xenozoid 19 août 2023 13:41

          @Enki

          un question de curiosité sur ton avatar)le nom). rien à voir avec enkil ?


        • Enki Enki 19 août 2023 13:54

          @Xenozoid

          J’ignore qui est enkil.

          Sinon, l’Enki sumérien est le frère d’Enlil : il me plait bien. Enlil est le gardien de la caste et de son ordre du monde entretenu par des serfs. Enki aide les hommes créés pour servir en en apportant la connaissance pour qu’ils s’émancipent. Une vieille loi du monde...

          J’aime bien aussi Enki Bilal (avec son comparse Pierre Christin). Avec son univers onirique, ses BD contenaient des étonnantes anticipations dystopiques qui m’avaient marquées. Et Partie de chasse, aussi, moins connu, un très bel enseignement de philosophie politique.


        • Xenozoid Xenozoid 19 août 2023 13:56

          @Enki

          enki ok merci,je sait ce que je voulais savoir


        • Xenozoid Xenozoid 19 août 2023 13:58

          @Enki

          enki bilal a meme fait un film, immortal ad vitam


        • Xenozoid Xenozoid 19 août 2023 14:00

          @Xenozoid

          mais ce n’etait pas sur enki,mais sur horus.....


        • Enki Enki 19 août 2023 14:02

          @Xenozoid

          Pas regardé. Je n’aime pas trop voir un film correspondant à un bouquin que j’ai aimé.


        • Xenozoid Xenozoid 19 août 2023 14:04

          @Enki

          c’est pas mal, tu devrais le voir, mais je connais les bd aussi.je suis plus un jodorowki, mais en fait c’est pareil, ce sont des techno mages,et les mythes sont puissant



        • Enki Enki 19 août 2023 14:15

          @Xenozoid

          D’accord, je me laisserai tenter, merci.


        • JPCiron JPCiron 19 août 2023 15:38

          @Enki

          Bonjour,


          Merci pour cette intéressante contribution, qui replace les concepts en perspectives.


          De nos jours, on considère que l’ Économie est constituée par l’ensemble des activités humaines relatives à la production, l’échange, la distribution et la consommation de richesses. (ce qui semble une activité assez ’’pauvre’’ par l’étendue du périmètre)


          J’apprends que c’était déjà le cas pour «  les penseurs scolastiques du Moyen Age : réduction de l’économie au matériel, à l’inerte, à l’utilitarisme »

          (ref votre post https://www.agoravox.fr/commentaire6617082)

          Il me semble que, sur ce point économique, les Principes politiques appliqués dans nos sociétés se calquaient sur les ’’Vertus’’ scolastiques, lesquelles faisaient écho à la lecture d’alors des livres sacrés. Qui est d’ailleurs quasi notre lecture d’aujourd’hui sur ce point économique.



          Pourtant, 400 ans avant JC, Xénophon affirmait que « c’est l’harmonie entre la nature, les dieux et les vertus personnelles qui permettent de réduire le travail : l’idée de Xénophon étant qu’une bonne économie est inscrite dans un bon ordre cosmique. » (ref. votre même post)

          C’est-à-dire l’intégration dans le ’’périmètre’’ de l’économie la nature, les dieux, l’ordre social-moral … Ce qui évoque tout de suite l’Égypte Ancienne où le respect de la loi de Maât (qui regroupait les règles de respect d’autrui, des animaux et des dieux) était l’unique moyen de ne pas déranger l’Ordre Cosmique. Ce qui était l’unique voie pour passer la ’’pesée du cœur’’ lors du jugement, et donc d’avoir accès à la vie éternelle. Ceci quelques millénaires avant la Septante...


          Les Anciens d’Orient avaient déjà quelques millénaires d’avance sur nous... et en ont rajouté une paire depuis.


          Dans un de vos précédents posts, vous parliez de « Oiko-nomos  : la gestion de la maison. » (ref. post https://www.agoravox.fr/commentaire6614938 ). Ce qui avait éveillé ma curiosité. Ma recherche m’avait amené à ce lien qui explore la longue histoire chaotique de ce terme : ( https://vep.lerobert.com/Pages_HTML/OIKONOMIA.HTM )

          C’est là que je me rendais compte que les Épîtres de Paul (principalement Éphésiens) semblaient ouvrir la porte grande pour « mettre en lumière quelle est la dispensation du mystère caché de tout temps en Dieu qui a créé toutes choses. » Et toutes ces choses sont « celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre. » Concepts qui s’ouvraient bien au-delà des activités humaines.


          Or, le Christianisme des origines s’est emparé de la quasi totalité de l’eschatologie du Zoroastrisme originel ( https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/zoroastre-son-credo-et-son-210639 )

          Outre l’eschatologie, les fondamentaux relatifs à la Gestion de la Maison contenaient aussi un point essentiel de l’architecture de pensée ’’écologiste » : le Dieu créateur avait doté les humains d’un niveau de conscience et de discernement nettement supérieur à celui attribué aux autres animaux. C’est pourquoi Dieu institua une Alliance entre l’homme et les animaux, imposant aux premiers de protéger les seconds (et leur habitat).

          Là-aussi, le Christianisme, qui est un peu paumé ces temps-ci, a un boulevard spirituel à défricher...

          https://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/zoroastre-sa-revolution-210455

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