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Accueil du site > Tribune Libre > Fouilles archéologiques de la ville-état UE (C.E.E./CE ?)

Fouilles archéologiques de la ville-état UE (C.E.E./CE ?)

De Giuseppe Di Gaspare*

...Même si le plan de la ville-Etat UE (C.E.E./C.E ?) a été retrouvé dans sa totalité, on s’interroge toujours sur son véritable nom et la civilisation qui la caractérisait, points obscurs que la première expédition n’avait pas permis d’élucider. La ville présente une structure architectonique complexe, avec des édifices publics et des espaces destinés au rassemblement ou au culte. La structure routière est tortueuse, caractérisée par des circonvolutions et des dédales de rues en boyaux qui n’ont rien de commun avec le réseau routier typique des urbs quadrata greco-romaines. Bien que les recherches effectuées aient fourni de nombreux indices tendant à soutenir cette thèse, celle-ci ne fait guère l’unanimité et il faut donc tenir compte de l’opinion minoritaire selon laquelle nous serions en présence d’une mégalopole orientale et, plus exactement de la mythologique Babel. L’extension de la ville joue en faveur de cette dernière hypothèse. L’ UE (C.E.E./C.E ?) s’étend selon un maillage relâché sur un territoire beaucoup plus vaste que celui de la ville-Etat typique. Il manquerait donc ici la règle fondamentale, selon Aristote, de toute ville-Etat : la possibilité pour un héraut de la traverser à pied en un seul jour. La minorité s’appuie essentiellement sur la découverte des vestiges d’une imposante structure en forme de tour. Celle-ci ne se dresse cependant pas vers le ciel mais, au contraire, sombre vers les profondeurs de la terre. Située au centre d’un ensemble d’édifices de même hauteur, elle n’est pas visible de l’extérieur. Avec ses cinq étages , ses colonnades qui donnent sur une place externe et, surtout la largeur de sa base, elle ressemble, selon la majorité, à une arène greco-romaine. La « Tour » (c’est ainsi qu’il a été décidé de l’appeler conventionnellement) se trouve aux confins d’une structure urbanistique plus vaste et complexe, composée d’édifices publics, de basiliques, de places et de temples, différemment reliés entre eux. Au centre de cette structure se trouve un ensemble d’Agoras sur différents niveaux, ce qui mène la majorité à croire qu’il s’agissait là du centre architectonique et donc politique de la ville. On serait alors dans le cadre de la polis. La minorité considère au contraire que la centralité urbanistique des Agoras n’est pas synonyme de prééminence politique. On souligne le fait que le tortueux réseau routier de la ville les traverse pour se diriger vers des édifices qui forment la circonférence externe de l’agglomération et qui donnent sur les arcades de la Tour. Ces accès tortueux, les espaces plus limités auxquels ils conduisent et qui se tournent vers la cour extérieure de la Tour, seraient les lieux sacrés voués aux cultes initiatiques et ésotériques nécessaires pour accéder à la Tour. La strate la plus antique, aux dimensions bien plus réduites que celles des deuxième et dernier niveaux, est composée de deux habitats primitifs respectivement appelés C.E.C.A. et EURATOM. Ceux-ci sont ensuite englobés dans la deuxième strate, plus vaste, appelée C.E.E., dont les composantes les plus récentes sont aussi dénommées C.E et qui se greffent sans solution de continuité sur la troisième et dernière strate C.E/U.E. Les rares vestiges du noyau primitif C.E.C.A. témoignent de la maîtrise d’une technique avancée du travail de l’acier, probablement réalisé avec l’énergie thermique produite par fusion du charbon. Les archéologues s’accordent pour penser que la deuxième implantation, EURATOM, pourrait tenir son nom de l’école philosophique atomiste d’Héraclite, par la suite supplantée, selon l’avis de la minorité, dans les autres strates, par des cultes initiatiques et ésotériques d’évidente origine orientale. Le plan de la strate C.E.E. révèle, lui aussi, une organisation relativement simple. L’édifice le plus important (facilement reconnaissable bien qu’incorporé dans les exhaussements successifs) semblerait avoir été, à l’origine, le siège des autorités propres aux villes-Etats. A côté de la salle du Conseil, organe délibératif, se trouve celle de l’exécutif, « la Commission ». Un peu plus loin, la salle du Tribunal présente des proportions modestes, avec ses chaises à haut dossier surélevées et typiquement disposées en éventail. Ce témoignage évident de culture gréco-romaine est négligé par la minorité qui voit dans le marché adjacent aux proportions extraordinaires la preuve que l’ensemble architectural sus-mentionné regroupait des structures destinées à l’attribution des campements et des bivouacs aux tribus nomades et à la résolution des querelles survenant lors des traditionnelles foires saisonnières. L’achèvement des fouilles a révélé que le périmètre du marché coïncide généralement avec les remparts de la ville-Etat. A l’intérieur du marché, on peut encore voir les restes d’ enceintes primitives qui sont probablement l’œuvre des différentes gentes fondatrices. La thèse en faveur de Babel s’appuie sur le fait qu’à l’intérieur des enceintes ont été retrouvées des inscriptions en différentes langues soutenant le nomadisme ou le retour à cet état des tribus engagées dans la construction de la Tour. Pour la majorité, la diversité linguistique révèle le pouvoir d’attraction d’un marché certainement non inférieur à celui d’Athènes ou de Rome, caractérisé par des trafics impliquant plusieurs ethnies. On a découvert le poinçon C.E.E sur les instruments servant à peser, à marquer, à mesurer, ainsi que sur les sceaux, marque qui s’est ensuite abrégée en C.E. Cette dernière, tout comme le sigle UE, a également été retrouvée hors de la zone du marché. Dans la dernière phase, les appellations C.E et UE sont toutes deux utilisées. Est-il possible que ces différents noms correspondent à différentes fonctions de la ville ? Le terme UE, plus retentissant, pourrait être le nom/cri de guerre de la ville. La minorité pense au contraire que UE désigne la ville dans sa dimension collective mystique et religieuse ; dans la dernière phase, l’appellation UE se serait étendue à partir des lieux de culte, la zone des temples, à toute la ville, ce qui prouverait le caractère théocratique/autocratique qui la distingue vers la fin. La minorité donne une version catastrophique du déclin de la ville pendant la période UE, ce qui est du reste conforme au mythe de Babel. Même si la période précédente, C.E.E./C.E, semble avoir été la plus glorieuse, aucun élément, au dire de la plupart des archéologues, ne permet de penser que la ville a subi un déclin brutal et inattendu. Les traces de dévastation qui ont été identifiées remontent en fait plus loin dans le temps et semblent imputables à des événements sismiques. Ces tremblements de terre auraient été déterminés par la « faille du dollar » qui traverse longitudinalement le centre de la ville-Etat. L’existence de cette faille, qui avait échappé aux Augures fondateurs, a été révélée pendant la période C.E.E. par un tremblement de terre dont l’épicentre se trouvait dans la zone du marché. La fusion d’une imposante statue de métal en forme de Serpent (dit « monétaire » car réalisé grâce à la fusion des pièces de monnaie offertes par les marchands) aurait dû exorciser le démon tellurique, en vertu de l’allégorie sacrée du « mouvement immobile » qu’il incarne. L’échec du Serpent, dû à un nouveau séisme, a donné lieu à la construction d’une plate-forme métallique antisismique, appelée ECU, véritable « bouclier » dont la fonction était de protéger les fondements de la ville consolidée par des coulées d’un alliage spécial dit « EURO ». Tous les archéologues pensent que la suppression du risque sismique a favorisé l’intense activité dans le domaine de la construction qui caractérise la période C.E/UE. On a retrouvé le sigle UE sur les trois énormes piliers édifiés à l’extérieur de la ville-Etat et adossés aux remparts. Les temples bâtis sur chacun de ces piliers ne sont pas achevés. Dans le temple consacré à la Guerre et à la Paix, l’autel central est à peine ébauché. Des traces de rites sacrificiels sont visibles sur les autels des nefs latérales consacrés aux divinités des différentes gents. Selon la minorité, au fur et à mesure que la Tour s’élevait et devenait plus complexe, la belliqueuse diaspora des tribus nomades s’amorçait et celles-ci retirant leurs tabernacles des temples communs, une fois terminés les sacrifices propitiatoires. Les deux autres temples, de la Solidarité Sociale et de la Sécurité Intérieure, sont également inachevés. La minorité affirme que leur construction aurait été dictée par la panique. La réalisation incomplète du superbe projet urbanistique et architectonique atteindrait son expression la plus parfaite dans l’étonnante et complexe architecture de la Tour, conçue pour « reporter les parties à l’unité et réduire l’unité à ses parties » selon un harmonieux dessin récursif en spirale, où tout début et toute fin de parcours aurait dû coïncider en tout point de la Tour. Les signes gravés sur les métaux et les pierres abandonnées semblent indiquer que ce projet est attribuable à l’ordre des moines « conventuels » (conventionnels ?) qui aurait remplacé le texte sacré inspirateur du plan des premiers habitats par un code chiffré ésotérique devenu incompréhensible à ses auteurs mêmes. On retrouverait, en somme, la même tentative démoniaque de fragmenter et de résumer le temps, l’éternité, à l’intérieur de la Tour, tentative qui provoqua, selon la tradition, la malédiction divine et le chaos de la diaspora. La centralité du système des agoras, ramifié et parfaitement relié à la Tour, atteste en revanche, selon la majorité des archéologues, la permanence de la structure politique de la polis : même si le plan d’ensemble des raccords apparaît excessivement complexe avec ses édifices différemment disposés en cercles concentriques et en dégradé, qui entourent de leurs loges et de leurs colonnades le puits d’où se dresse la Tour. A l’intérieur de celle-ci, les passages et les raccordements, toujours tortueux et prolongés par des bifurcations sans issues, les nombreux détours et les brusques changements de direction, les labyrinthiques déambulations et les impasses donnant sur des abymes vertigineux ou des places insoupçonnées, tout cela devrait son existence, selon la majorité, à la fonction défensive de la Tour : il s’agissait de confondre les non-initiés de façon à les dépister, les surprendre et les écraser. C’est cette logique de défense qui explique l’apparente irrationalité du projet et les nécessaires violations du schéma géométrique de la ville-Etat. Elle inspire le plan urbanistique d’ensemble : les œuvres de communication infrastructurelles pour intégrer la zone des temples dans le système architectonique des édifices et des agoras publiques grâce à d’impénétrables liaisons réticulaires convergeant de différentes manières dans la Tour. Les agoras sont là pour témoigner, au-delà de cette grandiose invention architectonique, de la permanence du caractère démocratique de la polis. Disposées sur cinq niveaux, elles augmentent en nombre de façon exponentielle à chaque descente de niveau, à partir de l’unique agora CE/UE . La colonnade interne de chaque étage donne sur la vaste « arène commune » entourant la Tour, ce qui permet aux différentes gents des différents étages de dialoguer constamment entre elles et avec les autorités publiques installées dans la Tour. Comment expliquer autrement, sinon comme témoignage de leur implantation, la rassurante toponomastique de la Tour : les couloirs des compétences qui bifurquent, les méandres des « coopérations consolidées », les montées et les descentes des « compétences concurrentes », les faux-plats de la subsidiarité horizontale, les vertigineux trompe-l’œil de la subsidiarité verticale...

Giuseppe Di Gaspare prof de droit de l’economie Université LUISS G. Carli Rome Ancien élève de l’ENA promotion H.F. d’Aguesseau (cycle étranger) 1981/82


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